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Lettre d’un abstentionniste à Monsieur le Président de la République

13/04/2010

Monsieur le Président de la République,

Deux phrases sont à retenir en ce début de printemps. Elles expliquent votre débâcle électorale. Il vous faudra les méditer.

Vous vous êtes rendu fin mars, accompagnée de votre épouse, aux Etats-Unis pour une visite officielle où vous avez rencontré Barack OBAMA.

Vu de France, on a pu se demander si le Président américain, peiné de vos exploits électoraux, ne s’était pas prêté à une opération de communication élyséenne. Via la télévision française qui a abondamment relayé l’évènement, et à destination des Français évidemment, les Américains n’ayant que faire de Nicolas SARKOZY, Président de la République française. C’est ainsi.

Il fallait vous voir blaguer avec Barack OBAMA, vous faisiez votre show, atmosphère détendue, sourires. C’est vrai, vous nous l’aviez dit lors de sa visite en France, alors qu’il était en campagne : « Barack OBAMA, c’est mon copain ». Vous lui aviez prodigué quelques conseils pour gagner les élections, vous étiez élu, lui pas encore. Ça donne de l’ascendant.

Depuis, on entend souvent que votre amitié n’est pas réciproque.

Vous avez félicité le Président OBAMA pour sa réforme sur la santé, vous leur avez rappelé aux Américains que nous en France, comme on est les meilleurs du monde, la sécurité sociale, on l’avait depuis cinquante ans. C’était l’occasion de faire la morale, toujours bien de faire la leçon pour un Français.

A la télé par contre, ils ont été impressionnés : vous avez dîné en tête à tête, avec vos épouses respectives, dans les appartements privés du couple présidentiel. Ça en jette ! Et vous aimez ça. Surtout que vous aussi, il est possible que vous n’aimiez pas tant que ça le Président OBAMA. Il est grand, il a une belle femme, plus grande que la vôtre ? et il est à la tête du pays le plus puissant du monde. Vous êtes peut-être un peu jaloux. Vous n’aimez pas la concurrence.

On doute que vous vous présentiez en France en 2012. Vous n’auriez pas l’intention par hasard de faire président des Etats-Unis ? Maintenant que vous connaissez l’job.

Vous l’aviez dit aussi,à peine élu, avec cette spontanéité toute enfantine : Président de la République, finalement, c’est pas si difficile que ça.

Et puis, vous avez prononcé cette phrase, parmi tant d’autres, vous parlez tellement, avec ce style qui est le vôtre :  » l’Président OBAMA, quand i dit queque chose, i tient parole ».

Mais cette phrase,  » l’Président OBAMA, quand i dit queque chose, i tient parole », cette phrase, elle semble tout droit sortie de votre subconscient. Vous ne l’avez pas censurée, elle est venue comme ça, sans réfléchir. Par contre la suite de la phrase, vous ne l’avez pas prononcée. Il ne valait mieux pas.

La suite, sous-entendue, la voici :  » pac’que moi, quand j’dis queque chose, j’le fais pas. I faut pas m’croire ».

Remarquez, Monsieur le Président, que vous l’ayez prononcée ou pas, les Français, l’avaient bien compris :ils vous l’ont dit à leur manière au mois de mars.

La deuxième phrase est du député UMP, Thierry MARIANI, qui a, d’une certaine façon, donné une explication de l’épisode électoral du mois de mars :  » Quand on est pris pour un con, il faut savoir à un moment terminer les choses ».

Et oui, Monsieur le Président,  » quand on est pris pour un con », un jour, on vous le retourne.

Ce sont ces deux phrases auxquelles vous devez réfléchir : elles expliquent vos trois premières années d’exercice.

Après vous être spécialisé dans la libération d’otages avec votre épouse de l’époque, premier coup de communication, suivi une étape du Tour de France, sur votre lancée, vous vous êtes dit: on va s’attaquer au pouvoir d’achat des Français. Vous l’avez sorti de votre chapeau à la sortie des vacances d’été.

On s’est dit : qu’est-ce qu’il nous fait ?

Depuis quand le Président de la République est-il en mesure d’améliorer le pouvoir d’achat ? Pour qui nous prend-il ?

Sauf que Solange du Mans, elle y a cru. Elle a appelé Europe 1 et a confirmé qu’il y avait un problème de pouvoir d’achat en France. Y’a qu’a voir le prix des yaourths chez Leclerc ! Et avec l’Euro, alors !

Remarquez, ce coup de communication, ça a marché. Pendant quinze jours, serviles, les radios et les télés se sont ruées sur cette nouvelle marotte du pouvoir d’achat.

Sauf qu’à plus long terme, les yaourths lui sont restés sur l’estomac à Solange. Surtout qu’avec la crise … Solange, elle a perdu son travail. Alors le pouvoir d’achat, elle pourrait vous en parler…

Pendant ce temps là, vous vous êtes augmenté votre traitement. Quand on la main dans le pot de confiture …

Et puis, vous vous êtes dit, finalement, Président de la République, c’est pas si difficile que ça. Il suffit de balancer un truc dans l’actualité, tout le monde s’engouffre sur le sujet. Et voilà, le tour est joué.

La commission ATTALI a fait couler beaucoup d’encre pendant des semaines et puis on a appris qu’on préférait mettre le rapport au placard. Jacques ATTALI s’en est allé tout penaud.

On entend parfois que la réforme des régimes spéciaux ne serait finalement pas allée jusqu’au bout, c’est vrai que la grève s’est terminée assez rapidement.

Par quel tour de passe-passe ?

On lance un débat sur le port de la Burka. Problème crucial de la société française ! L’identité nationale ? Incontournable. Même si ça ne débouche sur rien. Ce n’est pas grave. Ce qui compte, c’est occuper le terrain.

On nous annonce Guy Môquet à toutes les rentrées scolaires, des caméras de surveillance et des portiques dans les collèges. Pour quels résultats ? Dans une société déliquescente, les violences continueront.

Il vaudrait mieux s’interroger sur leurs causes et réfléchir aux politiques à mener. Mais c’est plus difficile. Réfléchir, lire …

Un marché de l’emploi bloqué, des mentalités à changer, une croissance qui patine depuis des décennies. C’étaient les défis à relever pour la vieille France.

Il y avait pourtant de bonnes idées, tenez, par exemple, celle de votre représentant de commerce, Xavier BERTRAND : « il faut créer des emplois, parce qu’un emploi créé, c’est un salaire à la fin du mois ».

La taxe carbone, réforme fiscale aussi importante que l’abolition de la peine capitale paraît-il. Des semaines de débat, dans les médias, au Parlement, des polémiques pour une taxe incompréhensible qui serait remboursée aux ménages assujettis ! Une usine à gaz que vous avez finalement décidé de supprimer du jour au lendemain. Tout ce temps, ce travail passé pour rien ! Que d’énergie perdue.

On s’est même demandé si la fronde de Chantal Jouanno, Secrétaire d’Etat chargée de l’écologie, n’était pas de la comédie, pour vous permettre de la sermonner et la remettre en place de façon cinglante afin de démentir une vilaine rumeur.

C’est qu’on vous a découvert plus écologiste que les Verts et Europe Ecologie réunis au mois de décembre, vous, le citadin jusqu’au bout de ses Rayban. Cette fibre verte s’est révélée au monde lors du sommet de Copenhague. Vous avez rêvé d’un succès, vous vous êtes démené, agité comme vous savez le faire. Là encore, vous flairiez le bon coup politique, pour ramener ensuite la couverture.

Votre politique, c’est la politique des coups.

Mais, vous aurez beau vous agiter dans tous les sens, ça ne marche plus, ça ne prend plus.

Le problème, c’est que vous ne faites pas président. Dans le Vercors ou sur le Plateau des Glières, vous n’avez pas la prestance et la solennité. Pas l’épaisseur.

Vous êtes jet-set sur un yacht, au Cap Nègre ou sur un lac aux Etats Unis avec les filles à bord, Dati & Co. Vous êtes un cliché ambulant, vous vous vantez qu’en France, quand il y a une grève, on ne s’en aperçoit plus, vous tapotez sur la fourmilière du bout de votre bâton, comme un sale gosse, pour l’exciter, vous vous proclamez  DRH de l’opposition.

Comment pouvez-vous être à ce point arrogant quand on a une épouse aussi ingénue ?

Alors que vous deviez être le Président de tous les Français.

Mais dès le début, vous avez confirmé tous les préjugés de ceux qui ne vous étaient pas naturellement acquis.

D’ailleurs, vous ne pouvez plus vous déplacer en province sans le cortège de CRS avec des rues barrées par les bus, depuis votre visite à Saint Lô dans la Manche.

Vous détestez être contrarié.

On va aimer vous voir contrarié durant les mois à venir.

Alors, méditez bien, M’sieur l’Président.